mercredi 10 décembre 2008

LES PLEURS


(Trésor spirituel de saint Tikhon de Zadonsk)

Dans ce monde, les gens pleurent sans cesse : ils naissent en pleurant, ils vivent en pleurant, ils meurent en pleurant.
Les hommes pleurent parce qu’ils vivent dans ce monde, et que ce monde est la vallée des larmes. Mille raisons poussent les hommes à pleurer, chacun dispose des siennes. Pleure donc toi aussi, chrétien ! Pleure, car tu vis dans la vallée des larmes ; tu as, toi aussi, maintes raisons pour pleurer. Pleure quand il est encore temps, quand tes pleurs te sont encore utiles. Pleure maintenant, pour ne pas pleurer éternellement. Pleure pour être consolé : « Bienheureux les affligés, car ils seront consolés » (Matt. 5, 4).
Les gens pleurent car ils sont malheureux. Pleure donc toi aussi, chrétien, car tu es un pécheur, tu as péché devant ton Seigneur, et le péché est un grand malheur.
Les gens pleurent car leur corps n’est pas en parfaite santé. Pleure donc toi aussi car ton âme n’est pas en meilleure santé. Ils pleurent car ils sont infirmes et malades. Pleure toi aussi, car tu as une âme infirme, malade et faible, à cause de l’orgueil, de l’envie, de la colère, de l’impureté, de la luxure, de l’amour pour la gloire, pour l’argent. Pleure car ton âme est emplie de maladies douloureuses, de passions et de convoitises. « Soigne-moi, Seigneur, et je serai guéri » (Jér. 17, 14), car Tu es mon Dieu et mon Sauveur !
Les gens pleurent car ils ont perdu leurs richesses. Pleure donc toi aussi, chrétien, car tu as dilapidé la richesse qui t’a été donné dans le saint baptême par ton Père Céleste. Les gens pleurent car ils sont pauvres et indigents. Pleure toi aussi, car tu es indigent et nécessiteux, pauvre et misérable. L’insupportable indigence est un péché. « Incline, Seigneur, Ton oreille et exauce-moi, car je suis pauvre et indigent » (Ps. 85, 1). Les gens pleurent car ils n’ont pas de quoi boire ni se nourrir. Pleure toi aussi, car ton âme meurt de faim, elle meurt car tu la prives de la parole de Dieu, et c’est une faim très grande et très pénible que de n’entendre pas la parole de Dieu. Les gens pleurent car ils sont nus, sans avoir rien pour se couvrir. Pleure toi aussi, car ton âme est nue : le pêché l’a dévêtue. La nudité du corps est honteuse, mais la nudité de l’âme l’est bien plus encore. Les hommes voient la nudité du corps, mais celle de l’âme est vue de Dieu et de Ses saints anges. « Heureux celui qui veille et qui garde ses vêtements, afin qu’il ne marche pas nu et qu’on ne voie pas sa honte » (Apoc. 16, 15). Celui qui ne veille pas et qui ne garde pas ses vêtements, celui-là est misérable et pauvre, car il marche nu et offre sa honte aux yeux de tous. « Donne-moi un vêtement clair, Toi qui es revêtu de lumière comme d’une robe, Christ mon Dieu, Très-Miséricordieux ! ».
Les gens pleurent quand ils tombent et se font mal. Pleure toi aussi, chrétien, quand tu tombes dans le péché et que ton âme s’abîme et s’affaiblit : le péché est une chute pénible et cruelle. Il vaut mieux chuter lourdement avec son corps qu’avec son âme. « Celui qui croit être debout, qu’il prenne garde de tomber » (I Cor. 10, 12).
Les gens pleurent leurs parents morts, leurs frères, leurs proches et leurs amis. Pleure toi aussi, chrétien, pleure ton âme qui est morte, comme Marthe et Marie pleuraient Lazare (Jean 11, 31-33). Que le Père Céleste te le dise aussi : « Mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé » (Luc 15, 24). Ô Jésus qui ressuscites les morts ! Ressuscite mon âme mise à mort par le péché, comme Tu as ressuscité le fils de la veuve (Luc 7, 12-15).
Les gens pleurent car ils doivent supporter les offenses et les violences de leurs ennemis. Pleure donc, toi aussi, devant Dieu à cause des ennemis de ton âme qui s’efforcent de te voler le salut éternel. Ces ennemis, ce sont le diable et ses anges mauvais. « Fais justice, Seigneur, de ceux qui me traitent injustement, combats ceux qui me combattent ; prends Tes armes et Ton bouclier et lève-Toi pour me secourir, tire Ton épée et ferme le passage à ceux qui me poursuivent, dis à mon âme : " Je suis ton salut " » (Ps. 34, 1-3).
Les gens pleurent quand ils sont appelés et conduits devant le tribunal, car ils craignent la honte et la condamnation. Pleure toi aussi, chrétien, car toi aussi, tu seras appelé au jugement. Mais ce ne sera pas le jugement des hommes, ce sera celui de Dieu, où le Juge n’exige nul témoin, car Lui-même connaît tous nos actes, nos paroles et nos pensées. Pleure dès maintenant, pleure tant que tu n’as pas été appelé. Pleure pour que le Juge soit attendri par tes larmes. Pleure pour n’être pas condamné ni jeté dans les ténèbres extérieures « où il y aura des pleurs et des grincements de dents » (Matt. 25, 30). « N’entre pas en jugement avec Ton serviteur, car nul vivant ne sera trouvé juste devant Toi » (Ps. 142, 2).
Les gens pleurent car ils ont contracté beaucoup de dettes, et comme ils ne peuvent pas payer, ils craignent d’être jetés en prison. Pleure toi aussi, chrétien, car tu t’es lourdement endetté par tes péchés auprès du Roi céleste, sans rien pouvoir payer. Pleure, attendris-le par tes larmes, afin qu’Il remette ta dette et que tu ne sois pas jeté dans la prison éternelle. « Père remets-nous nos dettes » (Matt. 6, 12).
Les gens qui croupissent en prison pleurent car ils ne voient pas la lumière. Pleure toi aussi, chrétien, car ton âme, couverte par les ténèbres des passions, ne voit pas la lumière divine. « Fais sortir de prison mon âme, pour que je confesse Ton nom » (Ps. 141, 8). Les gens entravés par les liens et les fers, pleurent car ils ne peuvent être libres. Pleure toi aussi, chrétien, car ton âme est entravée par les péchés et n’a plus aucune liberté. « Si le fils vous affranchit, vous serez réellement libres » (Jean 8, 36). Ô Jésus, libérateur de nos âmes emprisonnées ! Brise nos chaînes afin que nous T’apportions en sacrifice la louange.
Les gens pleurent car ils doivent supporter les coups et les blessures. Pleure toi aussi, chrétien, car ta mauvaise conscience blesse et fait souffrir ton âme bien plus qu’un bourreau. « Aie pitié de moi, ô Dieu, selon Ta grande miséricorde et dans Ton immense compassion efface mon péché » (Ps. 50, 3).
Les gens pleurent quand ils vivent sur une terre étrangère, loin de leurs maisons, loin de leur patrie aimée. Les Hébreux, captifs de Babylone, pleuraient ainsi : « Au bord des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions au souvenir de Sion » (Ps. 136, 1). Pleure toi aussi, chrétien, car tu vis dans ce monde comme sur une terre étrangère, sans voir ta patrie céleste, et la sublime Jérusalem. « Malheur à moi, car mon exil s’est prolongé » (Ps. 119, 5). Pleure toi aussi, mon âme, afin d’être consolée ici et là-bas. « Qui changera ma tête en fontaine et mes yeux en source de larmes, que je pleure jour et nuit » (Jér. 9, 1 ; 8, 23). « Exauce ma prière et ma supplication, Seigneur, prête l’oreille à mes larmes. Ne garde pas le silence, car je suis un étranger chez Toi, un pèlerin ainsi que tous mes pères. Épargne-moi, afin que je trouve le lieu du rafraîchissement, avant que je ne m’en aille et ne sois plus (Ps. 38, 13-15). « Venez, adorons et prosternons-nous devant Lui et pleurons devant le Seigneur qui nous a faits. Car il est notre Dieu et nous sommes le peuple de Son pâturage et les brebis de Sa main » (Ps. 94, 6-7). « Exauce-nous, Dieu notre Sauveur, espoir des extrémités de la terre et de ceux qui sont au loin sur la mer ! » (Ps. 64, 6).
« Nous avons commis le péché, l’iniquité, l’injustice devant Toi, nous n’avons pas gardé ni mis en pratique Tes commandements : ne nous rejette pas jusqu’à la fin. »

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